La bibliothèque était un endroit d’un calme imbattable qu’Ayumi aimait bien fréquenter à ses heures perdues. En effet, lorsqu’elle n’était pas prise par ses tâches de présidente du club de Théâtre ou qu’elle ne passait pas du bon temps en compagnie de Daisuke, elle aimait bien s’y réfugier pour étudier en paix. Non pas que les filles de sa chambre d’internat étaient particulièrement bruyantes, mais elles bavardaient parfois jusqu’à tard et il était impossible à Ayumi de réellement se concentrer lorsqu’il y avait des bruits parasites autour d’elle. Si Ayumi était aujourd’hui en classe A, ce n’était pas parce qu’elle avait des facilités à l’école ou qu’elle était une sorte de surdouée, mais elle avait toujours été assidue au travail afin de rester dans les meilleurs. Et puis ses innombrables défis avec son ami d’enfance n’avaient fait que la motiver davantage à être meilleure, juste pour le battre.
En tout cas, c’était midi et Ayumi avait des devoirs à terminer en avance pour pouvoir pleinement se consacrer aux activités de son club, alors elle décida d’engloutir rapidement son repas et de filer à la bibliothèque pendant son temps de pause.

La jeune femme se dirigea donc d’un pas rapide vers ledit havre de paix qui se situait au rez-de-chaussée de Jiyuu Gakuen. Tout au fond du couloir. Elle passa même devant l’infirmerie où elle aperçut un élève de première année qui discutait avec l’infirmier du lycée.
Ayumi connaissait beaucoup de monde au lycée, elle était ce genre de fille qui connaissait toutes les rumeurs, tous les secrets que recelaient les gens et elle avait toujours aimé être au courant de tout pour ne jamais perdre la face. C’était un moyen pour elle de garder son assurance à toute épreuve, car sinon lorsqu’elle perdait le contrôle, la timidité qui la décrivait lorsqu’elle était enfant et qu’elle avait vaincu grâce au théâtre referait aussitôt surface.

Ayumi passa donc son chemin et gagna bientôt la bibliothèque. Elle pénétra dans ce lieu où le silence et le respect, à son grand plaisir, étaient rois, et passa sans la regarder une seule seconde devant la bibliothécaire aux lèvres pincées et retroussées et aux yeux globuleux et méfiants. La jeune étudiante détestait cette femme à l’allure indésirable. Pourquoi les bibliothécaires avaient-elle forcément des rides partout et un physique ingrat ? C’était dérangeant.
Elle se balada un peu parmi les rayons, car en plus de faire ses devoirs elle comptait bien emprunter un livre pour sa lecture du soir. Elle avait fini ceux qu’elle avaient emporté de chez elle et comme elle ne savait pas si elle pourrait rentrer le week-end suivant à cause des activités de club, elle avait décidé d’en emprunter un directement ici.
La nippone se dirigea donc vers le rayon du surnaturel, ayant envie par curiosité d’aborder un genre qui était complètement opposé à sa personnalité. En effet Ayuyu était d’une rationnalité déconcertante et pour elle, le surnaturel était une bonne blague pour alimenter l’imagination des enfants et faire vendre des livres qui généraient du rêve et de l’envie. Mais tout ça n’était qu’utopie pour elle.
Elle parcourut les noms au hasard, et comme elle ne connaissait rien au genre, elle en prit un au hasard. Puis, une fois l’objet dans les mains, elle se retourna pour chercher une table. Il y en avait une non loin mais déjà occupée. Cependant elle reconnut Goto Akane, une jeune fille de première année qui avait décidé de se faire coacher par un Kaze No Shounen. Ayu suivait cette histoire de coaching de très près car elle trouvait le projet assez innovant et partant d’un bon sentiment, mais cependant pas assez abouti. La preuve, Takashima Kyosuke, le coach de cette fille, n’était même pas avec elle en ce moment. En même temps vu le personnage, ça ne l’étonnait même pas.

─ Hey, ton coach t’as laissé tomber ?

Pas terrible comme approche, mais Ayumi était connue pour son franc-parler parfois déroutant. Mais Akane semblait être une fille timide, alors elle tenta de rattraper le coup en parlant plus posément :

─ Ca te dérange si je te tiens compagnie ? Je ne serai pas bruyante, j’ai du boulot.

En attendant sa réponse, elle posa quand même son sac sur la table car il se faisait lourd pour les frêles épaules de la nippone, et si l’autre refusait sa présence, elle irait ailleurs.

Hj – désolée du temps de réponse, j’ai été submergée de rp et je le suis toujours x.x J’espère que ça te conviendra, j’ai bien aimé ton post ^-^

Ayumi adressa un léger sourire à la jeune fille. Goto Akane. Cette fille était exactement comme ce qu’elle avait entendu dire d’elle : timide, maladroite, peu bavarde. Rien que ces trois adjectifs suffisaient à se donner un aperçu assez réaliste de la personnalité effacée de la jeune première année qui se tenait devant elle, toute raide. Certes, la brune était persuadée qu’Akane cachait bien d’autres facettes plus reluisantes que ce qu’elle montrait d’elle, derrière sa carapace, cependant elle ne voyait que ce qu’on voulait bien lui montrer et pour le moment, la demoiselle lui donnait l’impression d’un chiot perdu, cherchant sa maman. Bon, sans doute qu’elle était assez grande pour cesser de courir dans les jupons de sa mère, mais son regard semblait terrifié alors qu’elle n’avait fait que la saluer.
Ayumi se sentit soudainement mal à l’aise. Akane lui rappelait sa propre attitude lorsqu’elle était enfant. En effet, étant petite, Ayumi était loin d’être la Reine du lycée comme elle le prétendait aujourd’hui. Réservée, toujours dans son coin, elle rasait presque les murs de l’école, se cachait derrière ses livres de cours en classe, parlait uniquement par nécessité aux autres et restait énormément en retrait. Un peu comme cette jeune fille qui se tenait en face d’elle actuellement.
Mais par chance, sa mère avait saisi le malaise de sa fille et avait pris les devants, décidant de l’inscrire dans un club de théâtre. Au début réticente, Ayu’ avait fini par jouer le jeu et ce fut une révélation. Elle adorait cela, et chaque année elle repartait pour de plus folles aventures avec son groupe.
Et puis elle avait rencontré Daisuke. Alors lui, quelle calamité ! Mais elle pouvait le remercier de deux choses : la première était qu’il ne l’avait jamais laissée tomber et lui avait donné une certaine confiance en elle, car en voulant à tout prix le dépasser dans tous les domaines où ils se défiaient, elle donnait le meilleur d’elle-même sans compter. La seconde, d’être son ami. Car mine de rien, elle savait que derrière son côté bourru et désinvolte, il serait toujours là pour lui remettre les pendules à l’heure si c’était nécessaire.
Sortant peu à peu de ses pensées, Ayumi eut juste le temps d’entendre Akane accepter qu’elles partagent la table, alors elle s’installa et dit :

─ Il me semble que tu étais en train de lire, je ne pense pas que ça va énormément me déranger.

Ayumi sourit. Cette élève avait besoin de soutien, comme elle en avait eu à l’époque. Sa famille l’avait beaucoup aidée, et Daisuke aussi par la suite. Et Akane tenait sans doute à rectifier le tir, sinon elle n’aurait jamais accepté de se faire coacher après tout. Mais elle était tombée sur Takashima Kyosuke, alias le fantôme des Kaze no Shounen. Elle en avait entendu des choses sur son compte, et le profil qu’elle avait pu établir de ce garçon était qu’il était taciturne, renfermé, fuyait toutes ses responsabilités. Elle savait aussi que son lieu de prédilection était le toit, et qu’il semblait y trouver un endroit pour se ressourcer et se relaxer. Pour sa part, la bibliothèque suffisait amplement.

─ Ce Kyosuke … Tu n’es vraiment pas tombée sur le meilleur du lot. T’aurais dû tenter ta chance avec Ryuzaki peut-être ! Ou Nobuo …

Mais elle avait des doutes à ce sujet. Nobuo était réputé pour être un draguer invétéré, et ça aurait sans doute mis Akane mal à l’aise s’il avait tenté quelque chose avec elle. Quant à Ryuzaki, cela était encore jouable, avec sa bouille de gamin et son entrain constant. Après, il y avait toujours Taiki, le boss des études, mais il était aussi renfermé qu’elle, donc les choses n’évolueraient pas des masses. Mieux valait éviter Shin qui était bien trop impulsif et qui s’énerverait constamment face à la jeune fille, ainsi qu’Eichi qui semblait parfaitement réticent à ce système de coaching. Jung Wan ne lui inspirait rien de bon non plus. Et Hiroto passait son temps à râler pour un rien. Au final, les plus envisageables pour une fille comme Akane étaient sans doute Anzai Ken, Fubuki Ryuzaki ou Endô Shuuji, même si ce dernier était drôlement mystérieux.
Des choses, elle en savait sur les gens. Ayumi était toujours très renseignée et au courant des dernières actualités de Jiyuu.

En tout cas la jeune présidente du club de Théâtre sortit ses affaires de cours et commença à étaler ses travaux sur la table, en essayant de ne pas prendre trop de place non plus. Soupirant, elle releva alors la tête et dit :

─ Dis-moi, tu appartiens à quel Club ?

HJ – tant mieux alors x’)

Ayumi, à voir Akane, était vraiment surprise d’avoir l’impression de voir son ancien « moi » dans un miroir. C’était assez déstabilisant comme expérience que d’avoir en face de soi une personne qui reflétait ce qu’on avait été un jour. Alors elle donnait cette impression de malaise à son entourage lorsqu’elle était petite, ou c’était juste Ayu qui se sentait mal vis-à-vis d’Akane ? Allez savoir. La jeune femme avait gagné en assurance au fil des années, grâce à son entourage, et elle les en remerciait maintenant. Surtout sa mère, pour l’avoir traînée de force dans un endroit dont elle ne voulait pas entendre parler.
Akane ne semblait pas avoir de personne dans son entourage pour l’aider à s’extérioriser, et c’était bien dommage. Mais la vie privée de cette fille ne regardait nullement Ayumi et elle ne comptait pas du tout lui faire subir un quelconque interrogatoire. Elle-même n’aurait pas apprécié qu’on s’immisce dans sa vie sans raison précise et donc elle estimait qu’elle n’avait pas à le faire avec les autres, même si sa curiosité la poussait parfois à vouloir le faire. « Ne fais pas aux autres ce que tu n’aimerais pas qu’on te fasse », comme dirait le dicton.

─ Le club d’Ikebana ? C’est intéressant ? Vous y faites quoi ?

Le but d’Ayumi était de faire parler Akane, de l’inciter à lui répondre en s’intéressant à elle pour qu’elle prenne un peu confiance. Puisque ce baka de Kyosuke ne tenait pas ses responsabilités, elle pouvait bien se rendre utile, non ?
Le club d’Ikebana … Elle ne s’en était jamais approché. A vrai dire elle était tellement prise par ses propres obligations de club qu’elle ne prenait pas le temps d’aller voir ce qui se passait ailleurs. Elle était quelques fois allée voir les joueurs de Basket pour rendre visite à Daisuke, restant toujours en retrait pour ne pas que celui-ci remarque sa présence. Elle était bien trop fière pour lui dire qu’elle aimait bien venir le voir s’entraîner.

Ayumi avait donc sorti ses devoirs et commençait à rédiger quelques notes. Elle devait faire un synthèse en histoire du Japon et elle surlignait les éléments essentiels qui lui sautaient aux yeux sur le document fourni en annexe par son prof. Ayumi soupira discrètement, elle n’aimait pas du tout l’histoire et préférait la biologie. C’était d’autant plus intéressant pour elle qui préférait en apprendre sur l’environnement et les humains que sur le passé de son pays. De toute façon, elle savait l’essentiel de l’histoire du Japon, et surtout les plus gros événements marquants comme Pearl Harbor ou la Seconde Guerre Mondiale, avec les bombes nucléaires à Hiroshima et Nagasaki. Mais les détails de chaque période historique de son pays, bof. C’était bien joli les samouraï et les geisha de l’époque d’Edo mais ça ne la faisait pas rêver.

─ Moi j’appartiens au club de Théâtre que je préside. C’est beaucoup de boulot …

Il était vrai que la jeune femme avait pour rôle de recruter les nouveaux membres, de les intégrer au groupe, de chercher des pièces de théâtre susceptibles d’être jouées, de vérifier que les membres apprenaient bien leurs textes et que certains ne désertaient pas. Elle courait souvent après les garçons du club qui manquaient régulièrement à leurs devoirs. Un peu comme Yoshida Eichi. Alors lui, c’était le mec parfaitement prétentieux qui tenait toujours à avoir le rôle masculin principal, mais qui au final ne venait quasiment jamais au club. Il débarquait dans les dernières semaines avant la représentation pour s’informer de la mise en scène et des costumes et puis voilà. Ayu avait fini par renoncer de lui courir après parce qu’il lui tenait tellement tête qu’au final elle perdait trop de temps. Mais comme il savait toujours son texte sur le bout de doigts, elle ne pouvait rien dire non plus à côté.

Ayumi jeta un œil au livre que tenait Akane entre ses mains. Les OVNI. Hum, alors elle était une amatrice de surnaturel ? Elle-même ne s’était encore jamais hasardé à lire un livre de ce genre et c’était pour cela qu’elle s’était retrouvée dans ce rayon aujourd’hui, pour tenter. En effet elle avait pris un livre au hasard dans le rayon et elle avait décidé de l’emprunter. Cependant c’était le genre d’ouvrage complètement opposé à sa personnalité rationnelle et droite, et elle avait peur de ne pas apprécier le genre à sa juste valeur.

─ Tu m’as l’air d’être branchée surnaturel … J’ai pris celui-là au hasard, dit-elle en pointant le livre du doigt, mais je n’y connais strictement rien. Tu peux me conseiller ?

Les exercices d’Ayumi risquaient de prendre un moment, et elle devrait sans doute interrompre ses devoirs afin de retourner en cours. Il lui restait déjà moins d’une heure avant la reprise et elle était certes douée en classe, mais pas de là à pondre une dissertation d’histoire du Japon en quarante-cinq minutes. Mais bon il fallait bien s’avancer, et la nippone continuait à s’appliquer à surligner les éléments importants pour ensuite faire quelques prises de notes de base avant la rédaction. Ayumi était plutôt minutieuse en ce qui concernait le travail, elle ne mâchait pas le travail et ne faisait pas les choses à moitié. Lorsqu’elle ne comprenait pas un exercice de maths, elle pouvait rester des heures penchée dessus jusqu’à le comprendre quelque peu, ou alors elle renonçait car elle avait d’autres devoirs en attente. Elle ne se souvenait pas non plus avoir passé une nuit blanche sur ses devoirs scolaires, mais elle s’était parfois couchée plus tard que d’habitude.
Soignée dans son travail, soignée dans son apparence, soignée dans son hygiène de vie, Ayumi avait tout de la parfaite petite poupée sans aucun défaut. Et pourtant, des défauts, elle en avait : un tantinet narcissique, elle adorait lorsqu’on lui disait qu’elle était jolie, bien coiffée, bien habillée … Car même si au lycée les élèves devaient porter l’uniforme, elle faisait en sorte de bien le porter, de l’agrémenter de petites touches personnelles et elle misait tout sur son maquillage – léger, entendons nous, sa coiffure, et son allure. Elle était également intransigeante, que ce soit avec elle-même ou avec les autres. Cela n’avait pas d’importance, il fallait toujours faire les choses de façon droite et bien faite. Un peu arrogante, peut-être, à se donner une certaine importance parce qu’elle connaissait beaucoup de choses sur les gens du lycée.
Mais au fond, la nippone restait une fille à l’écoute des autres, essayant de comprendre et résoudre leurs problèmes en les aidant, gentille et puis elle était du genre serviable. En fait, des fois elle en faisait trop. Elle voulait tout faire en même temps et il lui arrivait de se surmener. Mais elle ne pouvait s’empêcher de voir les choses traîner.

« Ca doit être apaisant comme pratique, de créer comme un jardin miniature ! C’est un peu ça, non ? »

La jeune fille n’était pas très renseignée sur ce club en particulier mais ce n’était pas parce qu’elle n’y appartenait pas ou ne connaissait personne hormis Akane qui le fréquentait, qu’elle ne s’y intéressait pas. Après tout elle s’était intéressée au Basket parce que Daisuke en était, alors pourquoi pas le club d’Ikebana, cela faisait une discussion supplémentaire avec la brune, et parler de quelque chose qu’elle connaissait bien la mettrait bien plus à l’aise qu’autre chose, non ?
Après l’avoir brièvement informée qu’elle fréquentait pour sa part le club de théâtre, Ayumi s’était replongée dans ses cours, poursuivant sa prise de notes minutieuse et sa lecture des documents fournis en annexe par le professeur. Mais elle avait vite remarqué qu’Akane possédait un livre relatant du surnaturel dans ses mains, peut-être était-elle connaisseuse du genre ? Après tout elle avait entendu dire que cette fille était réputée pour être rêveuse et assez imaginative, elle devait aimer ce style de livres.
Ayant elle-même emprunté un ouvrage du genre, mais n’y connaissant strictement rien, elle s’était permise de lui demander quelques conseils à propos de son choix.

« Hum, à vrai dire, je n’y connais rien, mais comme je n’aime pas rester fixer à un seul genre, j’essaie de m’intéresser à des genres que je n’ai jamais approché ».

Ayu lui adressa un léger sourire, et jeta un œil à la couverture de ce qu’elle comptait emprunter. Un ectoplasme était dessus, et elle soupçonnait des logiciels de montages photo d’être passés par là. En effet, Ayumi était quelqu’un de relativement r ationnel et il lui fallait toujours une explication à chaque phénomène. Elle allait sans doute avoir du mal à lire cela du coup, vu qu’il n’y avait rien de scientifiquement explicable.

« Tu penses quoi de celui que j’ai choisi ? Tu me conseillerais quel livre ? »

Curieuse, Ayumi avait alors posé son stylo pour se concentrer un peu plus sur sa conversation avec Akane. Elle semblait avoir moins de difficulté à tenir la discussion que ce qu’elle pensait. A l’époque, elle se serait enfuie en courant sans aucun doute si quelqu’un était venu l’importuner de manière inattendue. Mais la jeune fille semblait avoir beaucoup de volonté en elle, et voulait sûrement faire de son mieux pour s’épanouir. Et c’était très appréciable, après tout.

Hj – désolée c’est un peu court T-T